samedi 31 mars 2012

Emeli Sandé ressucite Massive Attack, entre autres...

Adele Emeli Sandé (elle abandonne son premier prénom pour ne pas être confondue avec la maintenant mondialement célèbre Adele) pénètre le Top 10 anglais pour la première fois en Juillet 2009 (#6) sur le single du rappeur Chipmunk Diamond rings pour lequel lequel elle chante le refrain. Elle récidive l'année suivante (#8) sur le Never be your woman du rappeur Wiley, très inspiré du Your woman de White Town en 1997, mais c'est en 2011 qu'elle explose tout et en solo avec son premier vrai single, Heaven, qui se place à la place #2 des charts britanniques et prépare le terrain pour l'album à venir, Our version of events, qui vient de sortir en France. Mais en parallèle de son travail en studio, d'écriture et d'enregistrement de ses propres chansons, Emeli Sandé écrit également pour les autres, c'est d'ailleurs comme ça qu'elle pose sa voix en featuring sur des titres à elle, et après ces deux premeirs rappeurs, c'est pour Professor Green, puis Tinie Tempah, Cheryl Cole et Alesha Dixon qu'elle collabore. Tout ce travail loin des caméras la prépare et lui fait aussi garder le meilleur, ce qui lui va le mieux, pour ce premier album qui est un vrai joyau de soul/R&B moderne.
Le meilleur ambassadeur est ce premier single qui ouvre l'album, Heaven, et qui, après une avalanche de cordes sirupeuses en intro, dégaine un beat drum'n'bass similaire à celui du Unfinished sympathy de Massive Attack de 1991 sur lequel Shara Nelson chantait magnifiquement son spleen et sa soul. Heaven a cette même ambiance mélancolico-punchy, et la voix d'Emeli Sandé n'a rien à envier à celle de Shara Nelson. Lorsque le refrain évolue en ad libs sur la phrase "then I'm gone", on se surprend à penser qu'on est vraiment monté au paradis et que ce sont des choeurs célestes qui accompagnent la voix lead sur ce magnifique morceau qui fait partie de mes titres préférés de l'année dernière, et un de ceux dont je ne me lasserai jamais.



Le reste de l'album, s'il n'est pas entièrement de la même trempe que ce premier single inégalable, est gorgé de soul profonde et moderne, teinté parfois de R&B, souvent de gospel. My kind of love, prochain et quatrième single à sortir de son album, est un beau mid-tempo inspiré qui fait la part belle à la voix de sa chanteuse, qui, il faut le souligner, a co-écrit chacun des 15 titres de son CD. Linéaire mais uplifting, il déroule sur un tapis ocre et chaud la soul d'Emeli. Where I sleep suit, avec un phrasé plus street que gospel cette fois, et une petite rhythmique qui l'accompagne tout du long de ce court morceau (2'12 !). Mountains enchaîne avec des arrangements tout en echos et une voix douce et hésitante portant le texte, délicat et fragile comme une bulle de savon, sur fond de violons très philly. Ce n'est que sur la fin du morceau qu'une rythmique appuyée apporte de la force au message optimiste du refrain "We'll climb mountains, climb mountains together", pour un effet finalement dans la même teinte qu'Heaven. Le titre suivant démarre presque acapella, la voix d'Emeli toujours très en avant simplement portée par de doux accords de piano. Et c'est sous cette forme que Clown dure encore un petit moment, jusqu'à ce que des arrangements soyeux de cordes ne parent cette douce et calme ballade jusqu'à son terme.
Changement de registre dès l'intro de Daddy, qui fut sorti en guise de second single fin 2011, puisque la chanteuse pince sa voix pour une intro planante mais dont on pressent la prochaine évolution en titre plus R&B. De fait, Daddy, s'accélère avec une rythmique jungle bien street jusqu'à son paroxysme qui voit la voix de la chanteuse s'élever et monter encore pour porter son message fort dans nos coeurs. Ce single moins facile n'a atteint que la 21ème place des charts anglais et ça s'explique par son caractère moins grand public, moins immédiat, je pense, via cette progression tout le long du morceau qui en fait un titre moins radiophonique. Maybe suit par un accord de piano plaqué et quelques accords de guitare bluesy qui annoncent la couleur pour ce nouveau mid-tempo mélancholique, mais dont le refrain plus enlevé est hyper accrocheur. A l'instar de l'album complet ou presque, l'ambiance n'est pas au dancefloor ou à la fiesta, mais à l'introspection et au vagabondage de l'esprit et du coeur. Pour moi, cet album est un moment de détente parfait pour paresser au soleil ou se caliner doucement sous la couette avant comme après plus d'actions...
Suitcase poursuit avec une guitare sèche très en avant pour accompagner Emeli Sandé et une fois encore, le mixage laisse la voix de cette dernière très en avant, ne distillant les différents éléments de l'arrangement que pour mieux la mettre en valeur. Ce titre me paraît être plus folk que le précédent, bien qu'ils devraient tous deux s'inscrire dans une sonorité plus américaine quand le début de l'album était bien de la brit-soul. Breaking the law continue sur cette lancée avec une mélopée guitare/voix que ne bouderaient pas les fans de Bob Dylan & co. Encore une foix, la voix d'Emeli porte le morceau et les félures, ses intonations nous font partager ses sentiments et sont de l'émotion à l'état brut.



Il était cependant temps de briser ce cycle downtempo et accoustique et Next to me, qui s'y colle et dès l'intro réveille par sa rythmique le battement de nos pieds. Mais ce n'est rien comparé à ce que nous fait ressentir le refrain quand il déboule ; d'inspiration gospel, il est fait pour faire se lever l'auditeur, taper dans ses mains et chanter à tue-tête "next to me ...youhoo!" Carton plein pour ce troisième single extrait de l'album, qui a permis à Emeli Sandé de retrouver la seconde place des charts anglais, et ce pour presque quatre semaines consécutives, puisqu'il tomba en troisème semaine en place #3 avant de remonter en #2 la semaine suivante... Moins de tempo mais toujours autant de soul d'inspiration gospel pour le titre suivant, River, dont le refrain coule apaisant et presque religieusement dans nos oreilles. Avec Lifetime, on retrouve une rythmique plus street/R&B et c'était pour moi un autre single potentiel, avec son refrain simple et court, mais accrochant l'oreille comme un jingle, une ponctuation d'après refrain que l'on retrouve avec plaisir.
Et quand chez certains, les fins d'albums sonnent comme du remplissage de CD avec des titres lents et mous du genou, ici, on voit qu'à l'opposé on nous enfile des perles l'une après l'autre. Hope est en effet une superbe ballade écrite à quatre mains par Emeli Sandé avec Alicia Keys qui se charge de la réalisation, des percus et des claviers tandis qu'Emeli s'accompagne au piano. Si ce titre n'a peut-être pas le charme instantané nécessaire à une exploitation en single, il n'en demeure pas moins un pur moment à savourer avec plaisir, de même que le Read all about it (Pt. III) qui suit. Il s'agit de la version solo en piano/voix du titre qu'Emeli a écrit et chanté avec Professor Green, et qui est devenu le premier numéro 1 de la belle en Octobre 2011 (2 semaines consécutives en Grande Bretagne). Plebiscité par ses fans, cette ultime plage de CD et titre bonus s'est vu atteindre en téléchargements seuls la place #49 de ces mêmes charts le mois dernier, lorsque l'album est sorti. Il est vrai que gommé des parties de son interprète rap original et réduit à sa plus simple expression au piano, même si elle perd en puissance, cette chanson vous va plus directement droit au coeur et clôt en beauté cet album.

La version iTunes rajoute un bonus, Tiger, qui alterne couplets dépouillés autour de la voix de la chanteuse et refrains plus rythmés et soutenus de choeurs, mais ce n'est qu'un titre "parenthèse" qui n'apporte pas grand chose de plus à la version CD pour moi. Un meilleur bonus aurait été le très beau et lancinant Kill the boy qui figurait sur le single Heaven aux côtés de la démo Easier in bed. Je me dois d'ajouter que la belle Emeli Sandé, au look facilement reconnaissable avec son crane rasé sur les côtés contrastant avec son brushing platine sur le haut du crane, ne dédaigne pas les remixes plus dancefloor puisque Heaven comme Next to me bénéficient de bons remixes dance d'un de ses producteurs Mojam tandis que ce sont les remixeurs Cahill qui ont officié sur son duo avec Professor Green et que la plupart de ses singles sont aussi passé à la moulinette drum'n'bass/jungle pour un son plus underground qui ne me sied guère... Ultime preuve que flirter avec le son club du moment ne lui fait pas peur, c'est elle qui prit le micro pour David Guetta lors de sa prestation aux derniers NRJ Music Awards à Cannes pour une excellente interprétation du Titanium normalement interprété par Sia, mais qui, en studio, avait d'abord été enregistré avec Madame Mary J.Blige... Qui sait si, après ce premier album soul, elle ne choisira pas plus de sons club pour son second opus ? Qu'importe le chemin qu'elle prendra, cette jeune anglaise est une diva, de studio, de la soul, car diva au micro avant tout !


1 commentaire:

  1. J'aime vraiment beaucoup... Tu m'as donné envie d'écouter son album en entier ;-) Merci!

    RépondreSupprimer